Quatre-vingts civils désarmés sont abattus par des éléments de l’armée française. Comme si tout avait été prévu pour qu’il y ait un drame.

De supposés tireurs provocateurs embusqués, mais les terrasses étaient contrôlées par la police, des tirailleurs algériens lourdement armés qui venaient directement du bled et n’avaient aucune expérience du maintien de l’ordre en zone urbaine...
La couverture montre un jeune lieutenant qui essaie de parlementer avec les manifestants qui ne sont pas des « insurgés OAS », comme le dira « L’Humanité », mais des Algérois en plein désarroi après la signature d’accords à Evian qui ne seront jamais appliqués sur le terrain : le FLN prendra seul le pouvoir. Le général Ailleret (commandant supérieur interarmées en Algérie) prétendra – sans la moindre preuve – que des coups de feu ont été tirés par des fenêtres de la rue d’Isly, dans le dos des soldats. Répétant mot pour mot ce qu’affirme le préfet de police d’Alger, Vitalis Gros, qui minimise le nombre des morts, 46 et 200 blessés, alors que 200 témoignages réunis plus tard permettront de dénombrer 80 morts, tous identifiés.

Des ordres, tardifs, « halte au feu », n’ont pas été suivis : on a retrouvé 2 000 douilles, ce n’est pas un tir d’intimidation mais un massacre frontal au fusil-mitrailleur. Comme s’il fallait indiquer aux négociateurs du FLN que l’armée française n’était pas à la botte des pieds-noirs...
C’est déjà le temps des cercueils. Les valises seront bientôt prêtes.
Les massacres et les enlèvements d’Européens à Oran, par centaines, quelques semaines plus tard, alors que les troupes du général Katz restent l’arme au pied, enlèveront toute illusion aux pieds-noirs.
L’historien Benjamin Stora constate que le silence fait sur ce massacre « est un des exemples les plus marquants de la censure pratiquée pendant la guerre d’Algérie : comme pour beaucoup d’événements, le gouvernement français n’a jamais reconnu sa responsabilité ».
François Pédron, Le 06 avril 2012.
http://www.parismatch.com/Actu/International/Rue-d-Isly-le-massacre-oublie-154791

Déclaration du Préfet Vitalis Cros (Préfet d' Alger De novembre 1961 à juillet 1962) :
" La population du grand Alger est mise en garde contre les mots d'ordre de manifestation mis en circulation par l'organisation séditieuse.
Après les événements de Bab-El-Oued, il est clair que les mots d'ordre de ce genre ont un caractère insurrectionnel évident.
Il est formellement rappelé à la population que les manifestations sur la voie publique sont interdites.
Les forces du maintien de l'ordre les disperseront, le cas échéant, avec toute la fermeté nécessaire. "
Dans son livre : " Le temps de la violence " ed Presses de la Cité :
« La nouvelle que nous redoutions et espérions à la fois arriva, les tirailleurs avaient ouvert le feu ».

Conformément aux recommandations, 102 gradés et hommes de troupe ont fait usage de leur arme.

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Mis en ligne le 08 février 2014