La région, terre d'accueil des rapatriés
Les Pieds-Noirs dans la région du Rhône
L'exil des pieds-noirs. Contrairement à bien d'autres villes de France, notamment du Midi, Lyon s'est montrée accueillante envers les Français d'Algérie.
Témoignages.

Elle s'en souviendra encore longtemps de cet hiver 1962-1963. A Châlons-sur-Marne, où elle avait décroché son premier poste d'enseignante, des engelures aux pieds l'avaient conduite à l'hôpital. Le petit manteau de daim et les escarpins enfouis précipitamment dans une valise à son départ d'Alger, quelques semaines plus tôt, n'étaient pas adaptés au climat champenois.

La pauvre chambre d'hôtel, la tristesse de sa mère qui ne se remettra jamais de cet exil forcé, restent dans la mémoire de Jeanine Mayer : " Je m'estimais pourtant heureuse d'être à Châlons où j'avais été bien reçue, notamment par mes collègues enseignants. Rien à voir avec l'accueil réservé aux miens dans le Midi de la France où les choses se sont mal passées. Les gens tentaient de s'engraisser sur le dos des Français d'Algérie. Petits commerçants et petits fonctionnaires étaient considérés comme autant des gros colons. Ce fut une honte ".

Un an plus tard, cette jeune professeure de physique arrive à Lyon où elle se fixera définitivement. La ville a alors une bonne réputation dans le milieu des Français d'Algérie. Contrairement à ce qui s'est passé à Marseille, la municipalité lyonnaise, alors dirigée par Louis Pradel, s'est montrée particulièrement hospitalière. Émile Azoulay, qui débarquait à l'époque de Mostaganem où il avait tout laissé derrière lui, se souvient : " Il entrait peut-être une petite part de calcul politique dans l'attitude de Pradel. Il n'empêche, l'homme a été d'une grande générosité en mettant notamment à la disposition des rapatriés les grands ensembles fraîchement construits de Rillieux et de la Duchère ".

Lyon se montrera même si " assimilatrice " qu'Émile Azoulay ne tardera pas à rejoindre l'équipe municipale où figuraient déjà des personnalités originaires d'Afrique du Nord, comme Roger Fenech. " Les Lyonnais m'ont respecté ", se remémore-t-il, ému.

Jeanine Mayer réussira elle aussi son intégration, mais par la voie associative : " J'avais été marquée par le travail alors réalisé en faveur des Français d'Algérie par le Comité de liaison des œuvres religieuses et d'entraide (CLORE) où étaient réunis le Secours catholique, l'Entraide protestante et le Fonds social juif unifié ".

Avec le recul, Jeanine Mayer estime que la sensibilité " sociale " qui a toujours marqué la société lyonnaise explique en partie la qualité de l'accueil alors réservé aux Français d'Algérie.

Émile Azoulay met plutôt l'accent sur la tradition très " centriste " d'une ville qui déjà ne passait pas pour un bastion du gaullisme. D'autant que, dans ces années-là, l'influence politique de Jacques Soustelle, quoiqu'en exil, pesait encore d'un poids certain sur le milieu politique lyonnais.

René Raffin
http://www.leprogres.fr/france-monde/2012/03/12/la-region-terre-d-accueil-des-rapatries

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Mis en ligne le 12 juin 2012

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