Jules Verne (1828-1905) est rarement cité comme un auteur ayant traité de la conquête de l'Algérie. Il l'a pourtant visitée en deux occasions et aimée.
Dans ce livre, la terre est heurtée par une comète ; une portion de la planète est alors propulsée dans l'espace. Sur ce morceau de terre errant dans la galaxie, seule une partie, surnommée " L'île
Gourbi ", est " féconde et agréable ". Suite à ces deux périples, Jules Verne écrit en 1885 Mathias Sandorf dont l'action se situe en majorité en Méditerranée. Il y évoque les similitudes entre la France et l'Algérie dans des passages comme celui-ci : " Les riches provinces de cette Algérie qu'on a proposé d'appeler la Nouvelle-France et qui en réalité est bien la France elle-même ". On note un engouement grandissant pour ces nouveaux départements dans Robur le conquérant en 1886 ou Jules Verne décrit Bône, " et les gracieuses collines de ses environs ", Oran, " la pittoresque " ou encore Philippeville " qui semble avoir été découpée dans le Bordelais ou les territoires de Bourgogne ". Il mentionne également le Sahara et la construction du transsaharien (alors un simple projet).
Mais c'est dans Clovis Dardentor, roman humoristique paru en 1896, que Jules Verne décrit avec le plus de précision et de passion Oran, ville qui tient " le premier rang entre les villes algériennes " et l'Oranie, département qui l'a particulièrement séduit puisque le climat y " est le plus sain d°Algérie ".
Le livre raconte l'épopée de deux jeunes gens sans fortune, Taconnat et Lornans, qui veulent se faire engager au 7e chasseurs d'Afrique. Ils sont accompagnés dans leur périple, de Dardentor, exubérant
tonnelier de Perpignan, et du couple Désirandelle. Tous débarquent à Oran et visitent la ville dont Jules Verne décrit les différents quartiers et la population hétéroclite, puis partent en voyage dans la province oranaise avec la Compagnie des chemins de fer algériens. " L'itinéraire avait été convenablement choisi. Des trois sous-préfectures que possède la province d'Oran, Mostaganem, Tlemcen et Mascara, ledit itinéraire traversait les deux dernières, et, des subdivisions militaires - Mostaganem, Saida, Oran, Mascara, Tlemcen et Sidi-Bel-Abbès - en comprenait trois sur cinq ". Jules Verne insiste dans ses longues représentations de ce trajet en train, sur la ressemblance entre les villages d'Oranie et ceux des campagnes françaises, sur la mise en valeur du pays avec ses routes nationales ", bordées de talus propres et de bornes militaires.
Il dépeint notamment Saint-Denis du Sig et ses environs comme " des terres d'une exceptionnelle fertilité, des vignobles superbes qui tapissaient le massif isolé auquel s'appuie la bourgade, sorte de
forteresse naturelle facile à défendre " ; Mascara est décrite telle " l'une des plus jolies villes d'Algérie ". Arrivés à Saïda, ils poursuivent par une promenade en caravane dans le Tell, région " la plus favorisée de la province d'Oran " pour arriver à Daya.
Dardentor et ses comparses ferment ensuite le cercle en passant par Sebdou " située au milieu d'un pays dont les sites sont de routes beauté, le climat d'une salubrité exceptionnelle, la campagne d'une fertilité incomparable ", s'arrêtent à Tlemcen " si jolie qu'on l'appelle la Grenade africaine " puis Lamoricière et Sidi-Bel-Abbès. Il s'inspire largement du guide Joanne dans ces descriptions mais fait également appel à ses propres souvenirs. Il n'oublie pas de rendre hommage à l'hospitalité des populations et aux produits locaux en écrivant " ce repas fut arrosé des bons vins d'Algérie, principalement le blanc de Mascara ".
Enfin, Jules Verne évoque de nouveau l'Algérie et plus largement l'Afrique du Nord dans son dernier roman " L'invitation de la mer " paru l'année de sa mort, en 1905. Il s'inspire du projet de " mer intérieure ", propose par le commandant Roudaire (1874) et imagine une importante transformation d'une partie du Sahara en un immense lac intérieur, transformation à laquelle sont opposées les tribus locales. Il y décrit avec verve l'occupation et la pacification française, les mœurs des Touaregs, à travers les espoirs et aventures de son héros, l'ingénieur Schaller, qui affirme : " Cent ans après que le drapeau français fut planté sur la casbah d'Alger, nous verrons notre flottille française évoluer sur la mer saharienne ".
Jules Verne, au travers de ses différents romans, a donc dépeint avec passion l'histoire de l'Algérie françaises du XIXe siècle. Il ne s'est pas attache, comme ses contemporains, a l'exotisme et au pittoresque du " pays ", mais plutôt aux bienfaits de la colonisation. Il a souligné la ressemblance croissante entre les trois départements d'Afrique du Nord et la métropole, loué le travail réalisé par les colons et admiré la mise en valeur des terres. Opposé à la colonisation " à l'anglaise ", il approuvait les méthodes de la France qui " ont profité à tous les habitants de l'Algérie " et croyait dur comme fer en l'Algérie française.
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Mis en ligne le 21 janvier 2015