François Mitterand, pourtant chantre de la décolonisation et de l’émancipation des peuple dans d’autres contextes, fut à la fin de l’année 1954 et au début de l’année 1955, l’un des plus zélés défenseurs de « l’Algérie française ».
Ancien ministre de la France d’Outre-Mer ( 12 juillet 1950 – 11 août 1951 ).
Ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Pierre Mendès France, François Mitterand agit sans état d’âme pour « rétablir l’ordre » par la force après avoir prononcé, dès le 12 novembre 1954, juste après le lancement de l’insurrection armée par le FLN, son célèbre « l’Algérie, c’est la France ! ».
Lors de son retour au pouvoir, au début de 1956, comme garde des Sceaux du cabinet Guy Mollet, François Mitterand, soutint une impitoyable répression et ferma les yeux sur les pires pratiques policières, notamment lors de la bataille d’Alger.
Discours du ministre de l’intérieur François Mitterrand :
« M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Intérieur. M. François Mitterrand, ministre de l’Intérieur. » (12 novembre 1954, même séance)
« Mesdames, messieurs, je pense que l’Assemblée nationale, à la fin de ce débat, voudrait connaître le plus exactement possible le déroulement des faits dont nous parlons.
C’est ainsi que, dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre, des attaques à main armée, des attentats à la bombe, des sabotages de lignes et de voies de communication, des incendies enfin ont eu lieu sur l’ensemble du territoire algérien , de Constantine à Alger et d’Alger à Oran.
Dans le département de Constantine, vous le savez, se produisirent les événements les plus graves. Là, cinq personnes furent tuées : un officier, deux soldats qui remplissaient leur devoir, un caïd et un instituteur, dans les conditions qui furent rappelées à cette tribune et dont personne ne dira suffisamment le caractère symbolique.
De jeunes instituteurs sont venus accomplir – et c’était le premier jour – la tâche qu’ils avaient choisie. Et voilà qu’ils sont frappés. Sauront-ils pourquoi ? Sans doute non, les choses sont vite faites. Assassinés, ils ont quand même le temps d’apercevoir le frère musulman qui tente de les défendre et qui meurt le premier.
Je prétends qu’actuellement certains doivent cruellement méditer sur le déclenchement hâtif de l’émeute, qui les a précipités dans une aventure qui les conduira à leur perte. Voilà donc qu’un peu partout, d’un seul coup, se répand le bruit que l’Algérie est à feu et à sang.
De même que le Maroc et la Tunisie ont connus ce phénomène du terrorisme individuel dans les villes et dans les campagnes, faut-il que l’Algérie ferme la boucle de cette ceinture du monde en révolte depuis quinze ans contre les nations qui prétendaient les tenir en tutelle ?
Eh bien ! non, cela ne sera pas, parce qu’il se trouve que l’Algérie, c’est la France, parce qu’il se trouve que les départements de l’Algérie sont des départements de la République française.
Des Flandres jusqu’au Congo, s’il y a quelque différence dans l’application de nos lois, partout la loi s’impose et cette loi est la loi française ; c’est celle que vous votez parce qu’il n’y a qu’un seul Parlement et qu’une seule nation dans les territoires d’outre-mer comme dans les départements d’Algérie comme dans la métropole.
Telle est notre règle, non seulement parce que la Constitution nous l’impose, mais parce que cela est conforme à nos volontés.
Personne ici n’a le droit de dire que le Gouvernement de la République a pu hésiter un seul instant sur son devoir car l’action qu’il a menée correspond à l’essentiel même de sa politique.
M. le Président du Conseil l’a déclaré cet après-midi : comment pourrait-on expliquer, autrement qu’avec beaucoup de vilenie, le règlement des affaires françaises que nous avons été contraints de conclure en Asie si l’on n’admettait pas que nous avons agi alors conformément aux principes que nous avons les uns et les autres définis, écrits et proclamés, afin de préserver le domaine français, ce domaine qui s’étend fondamentalement – je viens de le dire – des Flandres au Congo ?
C’est là notre vérité, l’axe de notre politique. C’est pourquoi il n’est certes pas contradictoire qu’on traite, lorsque cela paraît nécessaire, à Genève, et qu’on se batte parce que cela est également nécessaire dans l’Aurès ou en tout lieu où on tentera d’abattre, de détruire, de s’attaquer à l’unité de la patrie.
Les mesures que nous avons prises ont été immédiates. On me permettra, je suppose, de ne pas les énumérer.
Mais, je ne vois vraiment aucun inconvénient à indiquer à l’Assemblée nationale, comme je l’ai fait à la commission de l’intérieur, qu’en l’espace de trois jours, seize compagnies républicaines de sécurité ont été transportées en Algérie, ce qui a porté à vingt le nombre total de ces compagnies sur le territoire algérien.
En trois jours tout a été mis en place. On a dit : Est-ce pour maintenir l’ordre ?
Non pas seulement. Mais pour affirmer la force française et marquer notre volonté. Il ne s’agissait pas seulement de réprimer, de passer à la contre-offensive de caractère militaire afin de reconquérir un territoire qui n’était point perdu ! Il s’agissait d’affirmer, à l’intention des populations qui pouvaient s’inquiéter, qu’à tout moment, à chaque instant, elles seraient défendues. »
Discours tiré de :
« Les grands débats parlementaires de 1875 à nos jours. », rassemblés et commentés par Michel Mopin – Notes et études documentaires – La Documentation française – Paris, 1988
https://nouvellesduglobe.wordpress.com/2015/12/18/le-discours-de-francois-mitterrand-quelques-jours-apres-linsurrection-en-algerie/
Transmis par J.L.G
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