Ainsi les Beni Merin, les Beni Zian et les Beni Hafèz voyaient simultanément décroître leur puissance devant les attaques des peuples chrétiens. On a déjà constaté que les dissensions intestines dans les familles de chacune de ces dynasties avaient contribué à précipiter leur ruine ; d'autres éléments de dissolution vinrent ajouter pour les Beni Zian à ces malheurs.

Les tribus arabes qui avaient envahi l'Afrique sous le règne des khalifes Zirites ne s'étaient confondues ni avec les premiers conquérants, ni avec les Berbères. Elles n'avaient jamais accepté longtemps la domination d'aucun des chefs du pays ; et soit qu'on les vît s'allier avec le prétendant victorieux, soit qu'elles se missent en rébellion, elles avaient toujours les armes à la main. Profitant des discordes qui divisaient la famille des Beni Zian, les Arabes se soulevèrent dans la province d'Oran ; ils se rendirent maîtres de Mostaganem, de Mazagran, de Tunis, de Mazouna, et se déclarèrent indépendants. Toutes les tribus berbères depuis Mostaganem jusqu'au-dessous de Miliana, dans la Métidja, reconnurent leur autorité.

D'un autre côté, après une lutte de huit siècles, le christianisme avait entièrement triomphé en Espagne, et le royaume de Grenade était tombé au pouvoir d'Isabelle et de Ferdinand.
Un grand nombre d'Arabes s'étaient réfugiés en Afrique ; ceux qui, préférant leurs intérêts et leurs habitudes aux excitations du fanatisme, avaient espéré pouvoir vivre sous la loi des chrétiens, furent expulsés de la Péninsule par deux décrets de Ferdinand le Catholique de 1499 et de 1500. Lorsqu'ils arrivèrent dans le Maghreb, loin d'être accueillis comme des coreligionnaires qui avaient accepté les maux de l'exil plutôt que d'abjurer leur foi, (… ??)

Faut-il attribuer cet acte de barbarie, si contraire à l'esprit de fraternité que les musulmans du globe entier pratiquent toujours entre eux, aux vieilles querelles des Arabes et des Berbères, aux rancunes des Africains dépossédés par les rois de Grenade, ou bien à la cupidité sans entrailles des tribus qui en voyant débarquer ces fugitifs chargés de quelques bagages les attaquèrent et les massacrèrent pour les dépouiller plus sûrement ? Quoi qu'il en soit, tant de souffrances endurées par ces réfugiés ne firent qu'accroître la haine qu'ils avaient vouée aux chrétiens qui les avaient chassés de l'Espagne. Ils se disséminèrent sur tous les points de la côte, et donnèrent une nouvelle activité et un caractère de cruauté plus grande encore aux courses et aux brigandages des corsaires musulmans qui infestaient ces parages, et qui avaient fait surnommer cette partie de la Méditerranée le champ des pirates.

Ainsi, pendant que les peuples d'Italie avaient contribué à amener une sorte de rapprochement entre les commerçants européens et musulmans dans le royaume de Tunis et dans la portion orientale de l'Algérie actuelle, les Espagnols, par l'expulsion des Arabes d'Espagne, et par leurs agressions contre les ports du Maghreb, détruisirent bientôt ces bonnes dispositions. L'apparition des Turcs, qui donnèrent pour ainsi dire une organisation à la piraterie et se substituèrent au pouvoir des Beni Hafèz et des Beni Zian, fit perdre rapidement aux musulmans africains la prospérité dont ils jouissaient, et jeta entre les deux religions les ferments d'une haine irréconciliable.

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Mis en ligne le 11 février 2013

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