Rappel des faits qui m'ont incitée à constituer ce fichier des " enlevés portés disparus "

Les enlevés portés disparus de la guerre d'Algérie, 1954-1962, pour une grande majorité n'étaient pas des combattants mais des civils français de souche européenne (FSE), nés dans un pays qu'ils estimaient être le leur puisque c'était la France. Le rappeler, l'écrire, le dire, c'est répondre à un Devoir de Mémoire.

Le cessez-le-feu du 19 mars 1962, censé mettre fin à huit années de cette guerre éprouvante, a été suivi du massacre des populations civiles et des harkis. Des enlèvements massifs d'Européens ont été perpétrés.
Il faut noter que 1800 victimes environ ont été libérées après un emprisonnement d'un jour à plusieurs mois, que les rapatriements sanitaires ont été enregistrés et que les tortures subies pendant l'incarcération ne permettent pas à certaines victimes de s'exprimer, même encore aujourd'hui.
380 personnes sont de sort inconnu.
Le reste de ces malheureuses victimes reste à jamais des enlevés portés disparus (soit 2186 personnes dont 530 militaires).
Colette Ducos-Ader (extraits)

Pour prendre concrètement conscience de l'ampleur du problème des disparus

Pour réaliser l'ampleur du traumatisme que représentent les enlèvements de Français en Algérie de 1954 à la fin de 1962, il est utile de la matérialiser. Pour cela, rapportons à la population française de l'époque les chiffres de disparus, donnés par différentes recherches sur la question et qui sont sensiblement concordants.
Au recensement du 7 mars 1962, la France comptait : 46.530.000 habitants (1).
Au 1er janvier 1960, la population non musulmane d'Algérie s'élevait à 1.075.000 personnes (2).
Le rapport de ces deux chiffres montre que la population métropolitaine était 43 fois plus nombreuse que Ia population non musulmane d'Algérie.
Ainsi, en prenant les chiffres de Madame Ducos-Ader, Ie nombre des disparus définitifs entre 1954 et Ie 5 juillet 1962 s'élève à 2.186 personnes (1.656 civils + 530 militaires).
1.656 Français d'Algérie enlevés représenteraient, rapportés à la population métropolitaine, la disparition de 71.2O8 personnes !

Il faut ajouter les 456 personnes disparues le 5 juillet à Oran, dont la traduction métropolitaine donnerait 19.608 disparitions supplémentaires.
Cela porte le chiffre total des définitivement disparus à 2.112 personnes soit 0,2% de la population non musulmane d'Algérie.
Donc, rapportée à la population métropolitaine une perte de 90.816 personnes !
Notons que ne sont pris en compte pour les calculs d'équivalence que les civils non musulmans. Pour un tableau complet des enlèvements, il faut y ajouter les 530 militaires, et il faudrait y intégrer les nombreux Français musulmans, fidèles à la France, dont le recensement est difficilement possible.

Civils et militaires enlevés portés disparus
Régions Avant le 19/03/62 Le 19/03/62 Du 20/03/62 au 02/07/62 Du 03/07/62 au 31/12/62 1963 Après 1963 Sans date Totaux
Algérois 286 2 782 1041 9 - 15 2135
Constantinois 269 - 62 105 4 - 7 447
Oranie 168 1 502 766 5 - 8 1450
Sud 12 - 8 34 - 3 1 55
Lieux non déterminés 91 - 45 33 1 - 106 279
Totaux 826 3 1399 1979 19 3 137 4366
dont le 05/07/1962 Oran 456
(Document déposé à la Société des gens de lettres sous le numéro 2010-10-0126)
(Document réalisé par Alain Lardillier)

Paru dans "L'Echo de l'Oranie" n° 339 - Mars avril 2012

(1) Robert PRESSAT, "La population française au recensement de 1962", in revue "Persée", intitulée "Population, 17 ème année, n° 4, 1962, pp.627. L'auteur signale que les chiffres donnés dans l'article sont tirés du Supplément du " Bulletin hebdomadaire de I'INSEE " du 3 novembre 1962
(2) Service de la Statistique Générale en Algérie : " Tableaux de l'économie algérienne en 1960 "

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Mis en ligne le 25 mars 2012

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