Ils peuvent obtenir la modification de leur numéro de Sécu, qui révèle leur naissance outre-mer

22/12/1997 à 14h13
Les Français d'Algérie ont jusqu'au 31 décembre (1997 NDLR) pour faire modifier leur NIR (numéro d'immatriculation au répertoire national d'identification des personnes physiques, couramment appelé numéro de Sécu). Passé cette date, ils conserveront le 99 à vie. Pour tous ceux qui sont nés dans les anciens départements français d'Algérie, la mesure, promise par Jacques Chirac lors de sa campagne présidentielle de 1995, et concrétisée par une circulaire d'Alain Juppé du 30 septembre 1996 après un forcing de Guy Forzi, délégué aux rapatriés, revêt une importance capitale. Après le sexe, l'année et le mois de naissance, le numéro d'immatriculation au répertoire national d'identification des personnes physiques comporte, en quatrième position, un nombre à deux chiffres correspondant au lieu de naissance. Pour les natifs de l'Hexagone, c'est le numéro du département. Pour ceux qui sont nés à l'étranger, c'est le 99.
Si certains porteurs du 99 s'en fichent, d'autres, et notamment les pieds-noirs d'Algérie, le ressentent comme une marque d'infamie, la marque du rejet de la mère patrie. Dès le lendemain de l'indépendance, et durant les trente-cinq ans qui ont suivi, les représentants des rapatriés n'ont cessé de relancer les pouvoirs publics sur ce point. De fait, si certains Français d'Algérie ont conservé les numéros 91, 92, 93 ou 94, qui correspondaient, à l'époque, aux départements d'Alger, d'Oran, de Constantine et aux territoires du sud saharien, d'autres se sont vu attribuer le 99. "Pour remédier à cette situation, vécue amèrement par ces rapatriés, j'ai décidé de mettre en place une procédure, à compter du 7 octobre 1997", expliquait alors Alain Juppé.
Pour constituer leur dossier, les intéressés doivent retirer un formulaire à la mairie, à la préfecture ou auprès de certaines associations de rapatriés et le renvoyer accompagné d'une fiche individuelle d'état civil et d'une copie de la carte d'assuré social.
Dès l'annonce de la mesure, et bien avant la publication de la circulaire, les Français d'Algérie, prévenus par le bouche à oreille et les associations de rapatriés, se sont dépêchés de faire leur demande de changement. Pas moins de 10 000 lettres se sont abattues durant plus de un an sur les services de la direction régionale de l'Insee à Nantes, où se trouvent les services de l'état civil des Français nés à l'étranger.
A l'Insee, on ne cache pas sa surprise devant un tel phénomène et on n'arrive pas à déceler les véritables motivations de chacun. "Cela reste très ambigu, entre celui qui veut marquer le coup d'être né dans une Algérie française et celui qui estime qu'avoir le numéro 99, c'est risquer d'être marginalisé par son employeur." Au Recours, association de rapatriés qui s'attribue la paternité de l'idée, on y voit "la réparation morale pour une population française à qui on a imposé durant des années l'idée d'être née à l'étranger".
Pour le plus grand nombre, avoir le numéro d'un département français à la place du 99 permet symboliquement de retrouver toute son identité française. A l'Insee, de nombreux formulaires ont été renvoyés accompagnés de lettres pleines d'émotion: "Certains demandeurs nous ont raconté leur vie, ils nous ont dit qu'ils avaient tout perdu en Algérie et qu'ils voulaient achever leur réhabilitation administrative française avant de mourir", raconte un responsable. A l'Insee, on estime que 75 000 demandes ont d'ores et déjà été traitées, parfois non sans mal, et qu'il reste 25 000 dossiers en attente. "On a dû renvoyer les dossiers à ceux qui se sont trompés dans la transcription de leur ancien numéro, dit un responsable administratif. Mais les litiges les plus nombreux concernent les gens qui ont changé de patronyme ou qui l'ont francisé depuis leur arrivée en France, sans pour autant nous alerter." Au lieu du 99, les rapatriés se voient attribuer le numéro qui était celui de leur département de naissance en Algérie. A savoir, le 91, 92, 93 ou 94. Par la magie de l'Administration, ils se transforment ainsi en natifs de l'Essonne, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis ou du Val-de-Marne, puisque les numéros des anciens départements d'Algérie ont été réattribués à la couronne parisienne. Reste que cette mesure dite "de rectification du code 99" présente un défaut, elle ne concerne que "les rapatriés nés en Algérie avant le 3 juillet 1962". Quid des Français nés dans les protectorats français du Maroc et de Tunisie? Justement, Philippe Nouvion, secrétaire général du Recours France, considère que cette mesure concerne "tous les rapatriés, même ceux du Maroc et de la Tunisie".
http://www.liberation.fr/vous/0101231991-les-rapatries-d-algerie-numerotes-francais-ils-peuvent-obtenir-la-modification-de-leur-numero-de-secu-qui-revele-leur-naissance-outre-mer

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Mis en ligne le 08 oct 2010

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