Pendant que les troubles intérieurs menaçaient l'existence même de Carthage, sa puissance s'étendait au dehors. A l'issue de la première guerre Punique, le traité de paix lui avait enlevé la Sicile, la Sardaigne, la Corse, la plage ligurienne ; mais des conquêtes nouvelles en Espagne la dédommagèrent bientôt de ses pertes. Hannibal, qui devait porter la gloire des armes de sa patrie jusqu'au cœur même de l'Italie (1), commandait les troupes carthaginoises en Espagne. En 221 avant J. C. Rome prit ombrage de ses progrès, et voulut imposer l'Èbre comme limite des possessions de sa rivale ; elle prétendit même réserver au midi de cette ligne l'indépendance de Sagonte, colonie grecque. Hannibal, sans tenir compte des réclamations des ambassadeurs romains, s'empara de cette ville, et la ruina complètement. Cette audacieuse insulte à la protection du peuple romain fut le signal de la guerre ; elle fut rallumée en 219. Nous n'avons pas à suivre le héros carthaginois dans son invasion de l'Italie ; nous devons nous borner à rappeler les événements de la guerre qui eurent l'Afrique pour théâtre. La seconde guerre Punique ne se concentra pas, comme la première, en Sicile ; en peu de temps elle embrasa toutes les contrées qui bordent la Méditerranée occidentale, et les nations humides y jouèrent un rôle important. Quelques détails sont nécessaires pour expliquer l'intervention des indigènes dans cette grande lutte.

Formation des royaumes Numides

A la suite de l'invasion d'Agathocle, un grand nombre de tribus soumises aux Carthaginois avaient reconquis leur indépendance. Sans cesse préoccupés des difficultés et des intérêts plus sérieux qu'ils avaient sur le littoral et dans les contrées européennes, les Carthaginois ne purent faire rentrer ces tribus dans le devoir. Elles se constituèrent en États libres. C'est alors que se formèrent les royaumes des Massyliens et des Massésyliens, qui comprenaient toute la Numidie. Le roi des Massésyliens résidait à Siga, auprès de l'embouchure de la Tafna ; celui des Massyliens avait Zama pour capitale. La limite entre les deux royaumes était l'Ampsaga (Oued-el-Kebir). Au moment où éclata la deuxième guerre Punique, Gula régnait sur les Massyliens et Syphax sur les Numides les plus occidentaux.

Ces deux royaumes étaient tous deux trop rapprochés de l'Espagne pour que Rome et Carthage ne songeassent pas à y chercher des alliés. Gala, fils de Naravas, qui aida Amilcar à triompher des Stipendiés, se déclara pour Carthage ; Syphax, mécontent des faveurs prodiguées à Gula, écouta les propositions des Romains, et embrassa leur parti, en 213 avant J. C. Les deux rois numides ne tardèrent pas à en venir aux mains : la victoire resta à Massinissa, fils de Gula, qui commandait les Massyliens ; l'allié des Romains dut abandonner sa capitale et se retirer chez les tribus les plus voisines de la Mauritanie. Après cette bataille, Massinissa, à peine âgé alors de dix-sept ans, passa en Espagne, et prit une part glorieuse au combat dans lequel les Scipions furent défaits par Asdrubal et Magon, en 212. Mais pendant que l'armée de Gula était employée en Espagne au service des Carthaginois, Syphax sortit de sa retraite, rétablit ses affaires, et se mit en relation avec le sénat romain.

Variations de Syphax et de Massinissa

Devenu le plus puissant roi de l'Afrique, Syphax, emporté par son ambition et son inconstance naturelles, s'était rapproché de Carthage, et se plaisait à flotter entre les deux républiques qui le sollicitaient également. D'un autre côté, Massinissa s'était mis en rapport avec les Romains, et, touché de la générosité de Scipion, qui lui avait rendu sans rançon son neveu Massiva, fait prisonnier, il avait conclu en secret un traité avec eux, en 206. A la suite de cette alliance, il passa en Afrique pour entraîner les tribus dans le parti nouveau qu'il venait d'embrasser. Ainsi, pendant que les Romains perdaient le concours de Syphax, définitivement lié aux Carthaginois par son mariage avec la belle Sophonisbe, ils gagnaient Massinissa, moins puissant alors que son rival, mais plus jeune, plus habile à la guerre, et destiné à exercer une influence immense dans la lutte contre Carthage. Les chances de la guerre ne furent pas d'abord favorables au nouvel allié des Romains ; vaincu par Syphax, il fut contraint à fuir dans les montagnes avec un petit nombre de cavaliers et quelques familles emportant leurs tentes et chassant devant elles leurs troupeaux. Mais bientôt Massinissa, guéri de ses blessures, reparut dans son royaume, et récupéra le pouvoir. Il réunit une armée, et alla camper sur une montagne entre Cirta et Hippone royale (Constantine et Bône). Défait encore une fois par Syphax, il parvint à s'échapper à grand-peine avec soixante-dix cavaliers, et se réfugia chez les Garamantes, après avoir ravagé sur son passage les contrées soumises aux Carthaginois et à leurs alliés.

Les romains portent la guerre en Afrique

L'arrivée de Scipion en Afrique, en 205, jeta l'épouvante dans les possessions et parmi les alliés de Carthage, et rétablit la fortune de Massinissa. Il n'amena que deux cents cavaliers numides à l'armée romaine qui assiégeait Utique ; mais il apportait l'utile concours de sa valeur, de son expérience et de sa fidélité. Sa troupe grossit rapidement ; après avoir combattu à côté de Scipion dans plusieurs batailles, il fut envoyé en Numidie avec Lélius pour poursuivre Syphax et lui enlever le territoire qu'il avait usurpé. Massinissa battit Syphax, et le fit prisonnier en 202. Il s'empara ensuite de Cirta, qui était devenue la capitale de la Numidie. Sophonisbe tomba en son pouvoir ; mais ne pouvant la sauver de l'humiliation de figurer au triomphe de Scipion, il lui envoya du poison pour se donner la mort. Massinissa reçut le titre et les insignes de la royauté. La défaite de Carthage suivit de près celle de son allié ; Hannibal perdit la bataille de Zama, et les Romains dictèrent la paix, qui mit fin, en 201 avant J.C., à la deuxième guerre Punique. Cette lutte terminée, la Numidie se trouva partagée entre Massinissa, roi de Massyliens, dont les possessions s'étendaient au sud du territoire de Carthage, jusqu'à la Cyrénaïque, et Vermina, fils de Syphax, roi des Massésyliens, avec leurs anciennes limites, moins Cirta et quelques autres villes, qui furent données à Massinissa par les Romains.

Envahissements de Massinissa

Le traité que Rome venait d'accorder à Carthage ne pouvait marquer qu'un répit dans la destruction de la puissance phénicienne. L'agrandissement des États de Massinissa avait placé le roi numide sur la ligne même de toutes les frontières carthaginoises ; son activité, sa haine et son ambition le rendirent un voisin redoutable pour l'ennemie de Rome. Il ne tarda pas à envahir le territoire de Carthage ; il lui enleva ses meilleures provinces, anéantit ses dernières ressources, et réduisit cette république humiliée à implorer contre lui l'intervention romaine, sans pouvoir obtenir que l'exécution des traités fût maintenue et que l'audace de l'agresseur fut blâmée. Cette lutte dura presque sans interruption depuis l'an 193 avant l'ère chrétienne jusqu'en 150, peu de temps avant la troisième guerre Punique. Les résultats de la guerre furent pour Massinissa la possession de la Byzacène, de tout le pays des grandes Plaines jusqu'auprès de Bizerte et, de quelques autres parties du pays situées au sud ou à l'ouest du domaine très restreint de Carthage. Le roi numide étendit aussi ses États aux dépens de la Numidie occidentale, qui avait pris parti contre lui dans ses démêlés avec Carthage.

(1) La Deuxième Guerre punique, s’étendant des années 218 à 201 av. J.-C., a pour point d’orgue la campagne d’Italie : le général carthaginois Hannibal Barca traverse les Alpes avec ses éléphants de guerre mais renonce finalement à entrer dans Rome.
Sous la conduite d’Hannibal, les troupes carthaginoises, formées de Numides, d’Ibères et de Carthaginois, parties d’Hispanie traversent les Pyrénées et les Alpes et envahissent l’Italie. Le général avait longtemps préparé, par la diplomatie, son passage au nord de l’Italie et réussit à s’y trouver des alliés. Ainsi, des troupes Gauloises se joignent aux troupes carthaginoises. Puis, ils descendent vers le sud de la péninsule et font des ravages, un certain nombre de villes grecques du sud quittant l’alliance romaine, et battent plusieurs armées romaines. L’une de ses victoires est encore étudiée dans les écoles militaires : la bataille de Cannes. (Wikipedia)
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Mis en ligne le 26 mai 2012

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