Se débarasser à tout prix du " boulet algérien " voilà la seule préoccupation du pouvoir.
Cet épisode de la guerre d'Algérie a, depuis 1962, été soigneusement occulté par les gouvernements français et par tous les médias (mais l'ont-ils su ?).
Dix jours avant la signature des " accords d'Evian " l'armée française allait commettre, sur ordre de De Gaulle et de son gouvernement, la plus odieuse forfaiture de son histoire. Depuis le lever du jour de ce 9 mars 1962, une pluie d'obus tirés par l'artillerie lourde de l'ALN, installée en Tunisie, pleut avec une intensité sans précédent sur cette unité composée de jeunes recrues, des appelés pour la plupart.
Le commandant de l'unité n'a pas les moyens matériels de riposter car ses hommes ne sont équipés que d'armes légères. En effet, sur ordre du gouvernement on lui a retiré quelques jours plus tôt son artillerie lourde plus un régiment de la Légion étrangère et une demi-brigade de blindés. Ordre bien singulier puisque les services secrets avaient signalé une concentration inhabituelle de forces adverses en territoire tunisien, juste en face de ce secteur.
Sans cesse le commandant demande par radio à sa hiérarchie basée à Constantine et à Bône, l'appui de l'aviation pour le dégager. De son poste d'observation le commandant constate, à l'aide de ses jumelles, qu'à moins d'un kilomètre plusieurs brèches ont été ouvertes dans le barrage électrifié qui délimite la frontière entre les deux pays. Sur les collines environnantes des milliers de combattants de l'ALN progressent à découvert dans sa direction.
Ils sont à moins de deux kilomètres à vol d'oiseau. Il sait qu'il ne pourra pas résister à une attaque de cette envergure et que tous ses hommes vont se faire massacrer. Il se demande pourquoi on ne lui envoie aucune aide. Des négociations sont engagées avec les nationalistes algériens et Louis Joxe discute en ce moment même à Evian avec les représentants du GPRA. Pour amadouer les dirigeants nationalistes, le gouvernement français a décidé quelques jours plus tôt un " cessez le feu unilatéral ". Ainsi l'ALN (Armée de libération Nationale) peut agir en toute impunité et tenter une opération spectaculaire afin de négocier dans de meilleures conditions
Et c'est pour cette raison que De Gaulle va sacrifier sans aucune pitié, sans aucune émotion, quelques centaines de jeunes soldats appelés du contingent dans le seul but de démontrer à la métropole la nécessité urgente de terminer cette guerre quel qu'en soit le prix.
Informé de tout cela, le lieutenant-colonel Lisbonis, commandant la base aérienne 213 de Bône, hésite à intervenir. Un an plus tôt, au moment du putsch des généraux, il était resté fidèle à De Gaulle. En quelques heures la victoire change de camp. Les pilotes des T-6 arrosent de leurs mitrailleuses les fellaghas, surpris par une attaque aérienne qu'ils n'attendaient pas, et les A-26 franchissent la frontière, les poursuivant et lâchant leurs bombes sur les positions de l'artillerie adverse. Quant au lieutenant-colonel Lisbonis, il s'envole pour Paris. Le 14 mars 1962, le commandant de la base aérienne de Bône-les-Salines est mis aux arrêts pour avoir riposté aux attaques de l'ALN contre le barrage et sauvé quelques centaines de jeunes soldats et de civils français.
© Manuel Gomez pour Dreuz.info. - " J'accuse De Gaulle* " - Edition 2016 |
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Mis en ligne le 11 mars 2025